Qu’est-ce que le complexe d’infériorité ?
George est ingénieur automobile. Il travaille au sein d’une grande entreprise automobile à la conception de véhicule. Bien que George soit diplômé d’une prestigieuse école et que son poste soit valorisé socialement, il se sent inférieur aux autres. Que ça soit ses collègues ou son entourage plus proche.
Bien que compétent et reconnu par sa hiérarchie, il se trouve moins compétent que ses collègues. Et il pense avoir une vie moins « réussie » ou avoir un physique moins « avantageux » que des personnes de son entourage … Ce complexe d’infériorité engendre une sensation de mal-être quasi permanente. George en a assez de cette situation et souhaiterait que ça cesse.
Ici, le complexe d’infériorité est défini comme la sensation d’être inférieur aux autres, avec un mal-être très présent.
D’où vient le complexe d’infériorité ?
Les parents de Georges étaient très exigeants. Ils pointaient beaucoup ses défauts et minimisaient ses qualités et succès. Ses parents souhaitaient qu’il « réussisse », qu’il ait une « bonne situation ». Dans ce but, ils visaient l’excellence pour lui assurer un futur agréable.
L’inconscient de George a enregistré, qu’il fallait toujours viser l’excellence. En se basant sur de nombreux critères tels que : l’intelligence, le statut social, le physique … Et vu qu’il y a toujours mieux que lui, il est toujours possible de faire mieux. C’est le hamster qui court dans la roue, cherchant l’excellence pour s’autoriser à vivre le bien-être. Et vu que l’objectif est inatteignable, l’accès au bien-être n’est pas autorisé. Il en découle une perpétuelle frustration, d’où la sensation de mal-être.
Avec l’histoire de George, nous pouvons voir que le complexe d’infériorité vient d’une stratégie inconsciente qui vise constamment l’excellence. Ceci en se comparant aux autres, à travers plusieurs critères :
- L’intelligence
- Statut social
- Le physique
- …
Les critères ont été transmis principalement par ses parents. Selon eux, répondre à ses critères permettait d’être heureux. L’inconscient de George à donc filtrer la réalité à travers ses critères, afin de se comparer et travailler pour atteindre l’excellence. Cette stratégie inconsciente est très coûteuse en énergie, car il y a toujours plus performant que soi dans un ou plusieurs de nos critères. L’intention de la stratégie du complexe d’infériorité est le bien-être, or le résultat est le mal-être.
Les critères définissent ce que je suis, mon identité :
- Je suis l’intelligence
- Je suis le statut social
- …
Si je suis identifié aux critères, le fait de ne plus les remplir, il y a une perte d’identité. Ce qui cause une souffrance. L’inconscient va faire tout son possible pour rétablir l’identité qu’il a construite, et qui est censée lui apporter le bien-être.
Pourquoi l’inconscient crée des stratégies qui engendrent la souffrance ?
L’inconscient sert la vie et cherche avant tout la sécurité et la nourriture affective nécessaire à son développement. Si l’inconscient n’avait pas mis en place des stratégies pour que George puisse correspondre aux attentes de ses parents, il n’aurait pas eu l’amour essentiel à sa survie. Ce qui aurait causé sa mort (Voir l’expérience de Frédéric II). De plus, le cerveau de l’enfant n’étant pas mature, il n’est pas possible pour l’inconscient de définir des stratégies complexes du style :
- Dans tel cas, je travaille pour atteindre l’excellence
- Dans tel autre cas, j’accepte d’être là où j’en suis
Avant 7 ans, seules des stratégies simples peuvent être mises en place. Celles-ci sont basées sur le principe d’évitement du « non-amour ». C’est à dire, que les stratégies mises en oeuvre par l’inconscient, ont vocation à éviter une émotion. (Pour aller plus loin, lire l’article « En quoi le juge intérieur est un enfant protecteur« ).
L’inconscient de George souhaitait éviter les jugements de ses parents. Car pour l’enfant, ces jugements sont perçus comme un rejet, un « non-amour ». Ceci est dangereux pour l’inconscient, car le manque d’amour peut engendrer la mort. Il a donc évité le rejet et mis en place la stratégie du complexe d’infériorité, pour vivre l’amour. Vu l’immaturité du cerveau, il n’était pas possible pour l’inconscient, de percevoir que la stratégie allait générer un mal-être et non le bien-être.
De plus, l’inconscient de George a aussi perçu que ses parents vivaient une émotion désagréable, quand ils ne répondaient pas à leurs propres critères. Il a donc intégré les critères à remplir pour éviter de vivre ses émotions désagréables.
Du fait de l’immaturité du cerveau et l’incapacité à appréhender la complexité, l’inconscient cherche à éviter le « non-amour », car il a peur de mourir. Cette peur, est l’équivalent de rouler à 300 km/h en voiture. Autant dire qu’il ne voit pas grand-chose autour et se focalise seulement sur ce qu’il veut éviter.
Or, la complexité de la vie fait qu’il n’y a pas une solution unique pour tous les cas de figure. À titre d’exemple, si mentir est interdit, comment feraient les personnes qui ont menti pendant la guerre pour sauver des enfants juifs ?
Tout dépend de la situation. Or, l’inconscient applique une « règle », quelle que soit la situation. De plus, vu que la réaction de la stratégie de complexe d’infériorité est basée sur la peur, l’inconscient utilise la force pour appliquer la stratégie. Ce qui cause une tension intérieure.
Comment se libérer du complexe d’infériorité ?
Remettre en cause ses critères identitaires
Identifier les critères associés à la sensation d’infériorité
L’objet est d’identifier les critères sur lesquels repose mon identité. Ceci, afin de les regarder avec plus de recul dans un second temps.
Suite à son histoire, George comprend que ces critères sont :
– Le statut social : George est gêné si des personnes de son entourage ont un meilleur statut social que lui
– L’intelligence : George est gêné si des personnes ont compris des choses qu’il n’a pas comprises
– Le physique, l’apparence : George est gêné si des personnes ont une voiture ou des vêtements plus prestigieux
Analyser ses critères identitaires
Je m’attribue moi-même les critères d’infériorité. J’ai donc le pouvoir de les évaluer et les remettre en cause.
L’objet est de voir que l’inconscient réduit la réalité à un nombre réduit de critères. Et qu’une personne est complexe, ce qui fait que la comparaison entre 2 individus est impossible.
Il s’agit de prendre ses critères un par un, et voir en quoi la personne n’est pas meilleure que moi, mais pointe juste dans un domaine. Et moi, dans un autre. Par exemple :
- Une personne peut être plus intelligente que moi et ne pas savoir jouer de la guitare comme moi
- Une personne peut avoir un physique plus avantageux que le mien et envier mon statut social
- Une personne peut avoir une meilleure capacité de concentration que moi et avoir moins de capacité de communication
- …
Une personne est complexe et il y aura toujours des domaines où je serai moins bon qu’une autre, et d’autres où je serai meilleur. Ce qui fait que personne ne peut être meilleur que moi, seulement meilleur dans un domaine.
Personne n’est meilleur que moi et je ne suis meilleur que personne
Se focaliser sur ses qualités
Prenons le test de personnalité MBTI (Voir les 16 personnalités)
Un extraverti est un meilleur communicant qu’un introverti. Par contre, ses capacités de concentration sont plus faibles.
George réalise qu’il a plus tendance à être introverti et que ses lacunes en communication sont le reflet de ses capacités de concentration. Il prend conscience que là où il se croyait inférieur, il est juste meilleur dans un autre domaine.
La peur sur laquelle repose le schéma inconscient du complexe d’infériorité inhibe ma capacité à percevoir la complexité. Elle m’empêche de voir qu’il y a une qualité derrière ce que je crois être inférieur et que je suis juste différent.
Prendre conscience que les critères sont neutres
Je peux qualifier un critère comme « bon » au « mauvais ». Or, ils sont neutres. Pour illustrer ceci, prenons l’exemple de l’intelligence. Elle peut être utilisée pour :
- Prendre soin de la vie (guérir, facilité la vie de nombreuses personnes …)
- Détruire la vie (créer des armes, concevoir des systèmes de spéculation sur les matières premières qui engendre des famines à l’autre bout du monde …)
Il n’y a aucune situation qui est juste dans l’absolu. Il n’y a que du cas par cas. Si je reprends l’exemple de l’intelligence ci-dessus, je peux avoir tendance à dire que détruire la vie est « mauvais ». Or, si je fais référence aux résistants pendant la guerre qui ont dû détruire la vie de soldats allemands pour préserver la vie de nombreuses personnes, je ne peux pas être aussi affirmatif.
Il n’y a pas de critère absolu, de règle que je peux appliquer, quelle que soit la situation. Il n’est donc pas possible de savoir à l’avance en me basant sur des critères, règles … Mais seulement de percevoir la réalité de l’instant et agir en conséquence.
Par exemple, « je suis intelligent » est neutre. À certains moments, ceci pourra m’être utile, à d’autres moments, cela pourra me desservir (Lire l’article « Pourquoi intellectualiser peut engendrer la souffrance« ). La question est donc, est-ce que je peux me dé-finir avec des critères ou suis-je déjà fini ? 🙂
Prendre conscience que ce que je cherche est déjà là
Comme nous l’avons vu plus haut, le schéma inconscient du complexe d’infériorité cherche à éviter les situations de non-amour, les situations où les critères ne sont pas remplis, pour vivre le bien-être.
L’inconscient scanne la réalité pour identifier les situations à éviter et les remonte au conscient (l’erreur que j’ai faite, le collègue qui est plus intelligent …). Le résultat, c’est qu’avec une telle stratégie, c’est qu’il y a toujours quelque chose à « améliorer ». Ce n’est jamais bien et donc, je suis toujours en tension.
Or, c’est comme une personne qui cherche à avoir un iPhone. Il ne cherchait pas un iPhone avant que celui-ci existe. Il le cherche parce qu’il sait qu’il existe. Pour l’inconscient c’est pareil. L’inconscient cherche un état d’être parce qu’il le connait. Car l’état d’être souhaité a déjà été ressenti en soi. Malgré ça, l’inconscient me fait croire que je dois répondre à certaines conditions, certains critères, pour vivre un état d’être agréable. (Pour aller plus loin, lire l’article « Comment se libérer de la peur du manque« ).
George réalise qu’il souhaite vivre un état d’être agréable, derrière tout l’inconfort qu’il vit. Il se rend compte que cet état est déjà en lui, et qu’il peut s’y connecter. Qu’il y a juste une habitude pour se centrer sur un autre état d’être. Il décide de s’entraîner à ressentir cet état d’être souhaité 10 fois par jours. Pour bien le conscientiser. Et ainsi, ne plus croire les schémas inconscients qui lui font croire qu’il a besoin d’une condition pour vivre cet état d’être.
Traverser l’émotion d’infériorité
Les stratégies inconscientes du complexe d’infériorité visent à éviter une émotion. Ce qui engendre des tensions intérieures. Et la mise en route de la machine à blabla qui « cherche » des solutions d’évitement. Si je vis l’émotion tant redoutée, l’inconscient voit que je ne suis pas mort. Et tout le système de défense associé n’a plus lieu d’être. Pour se libérer d’un schéma inconscient, une solution consiste donc à traverser l’émotion évitée.
Pour ça, je dois identifier une situation où je ressens l’émotion associée au complexe d’infériorité. Et je me focalise uniquement sur le corps, sur la sensation, jusqu’à être à l’aise avec la sensation. Si vous souhaitez aller plus loin, j’ai détaillé une technique dans l’article « Comment lâcher prise« .
Le complexe d’infériorité est le reflet des critères que je me suis attribué pour me dé-finir. Et éviter de vivre certaines émotions.
Sébastien Thomelin – Accompagnant de l’être